Paru aux États-Unis en 1983, le Temps et les Autres
s’est imposé rapidement comme un classique de l’anthropologie. Sans
cesse réédité et publié pour la première fois en France, l’ouvrage de
Johannes Fabian est devenu le texte
fondateur d’une anthropologie critique, qui reconsidère, depuis trente
ans les questions théoriques fondamentales de cette discipline.
C’est en introduisant dans le questionnement sur la fabrication de l’altérité en anthropologie la question du Temps que Fabian a bouleversé les pratiques et théories académiques.
Certes, la question du Temps a été envisagée par les diverses écoles ou courants de l’anthropologie, mais Fabian
montre clairement comment tous ont en réalité mis en place des
stratégies d’évitemment de cette question, tout en faisant mine de s’en
inquiéter.
L’ouvrage se fait donc souvent fortement critique, tant à l’égard du
relativisme anglo-saxon que du structuralisme français. Partant d’une
archéologie foucaldienne de l’anthropologie, par une étude minutieuse de
l’énonciation du discours anthropologique - y compris dans ses
sous-entendus linguistiques -, en passant par des réflexions sur le
terrain ethnologique et jusqu’à la manipulation de notions
philosophiques du Temps, Fabian a méthodiquement construit une critique à la fois radicale et fondatrice de l’anthropologie.
Par delà les questions propres à l’anthropologie, Le Temps et les Autres est un ouvrage qui s’adresse aussi bien aux sociologues qu’aux philosophes et aux historiens, puisque comme Johannes Fabian
le précise : « Le temps peut donner forme à des relations de pouvoir et
d’inégalité » ; il est au fond question ici de politique.