24 Haz 2010

Économie et société /1

L'ouvrage phare du père de la sociologie allemande comporte ses concepts clés : la méthode des idéaux-types, les formes de domination, la rationalisation de la société. Une oeuvre marquante pour la discipline...
Publié en 1922, Économie et société est le livre majeur du sociologue allemand Max Weber.
Le premier chapitre d'Economie et société est consacré aux concepts fondamentaux de la sociologie (l'action et les relations sociales, l'ordre légitime, la lutte, la communalisation et la sociation, le groupement, la domination...). Il offre, en guise d'entame, une définition de la sociologie entendue comme une science empirique « qui se propose de comprendre par interprétation l'action sociale et ce faisant d'expliquer causalement son déroulement et ses effets ».
M. Weber signifie de la sorte que la tâche du sociologue consiste à saisir le sens qui motive ces actions spécifiques à l'occasion desquelles les individus prennent en considération le comportement d'autrui. Le sociologue doit aussi expliquer, à l'aide du principe de causalité, la séquence des faits dans laquelle prennent place ces actions. Dans la tradition allemande des sciences de l'esprit, M. Weber fait ainsi sienne l'idée en vertu de laquelle, à la différence de celui de la nature, le monde des hommes est façonné par des valeurs, des intérêts... qui gouvernent les actions des uns et des autres. Alors que les sciences naturelles ont affaire à des objets qui s'imposent à la conscience comme des données extérieures, les sciences de l'esprit travaillent sur l'expérience vécue des individus. Produit par et pour des êtres de conscience, les actions sociales sont des activités chargées de sens, donc compréhensibles par d'autres hommes.
MICHEL LALLEMENT
Max Weber (1864-1920) : aux sources de la sociologie allemande
http://www.scienceshumaines.com/index.php?id_article=3918&lg=fr 


En un sens, on peut dire que toute l’œuvre de Weber est dominée par la question des origines du capitalisme : pourquoi et comment le capitalisme a-t-il fini par s’imposer non seulement comme mode dominant, voire exclusif, de comportement économique mais encore, bien plus largement, comme modèle culturel marquant l’ensemble des sphères de la vie sociale, spirituelle aussi bien que matérielle, dans l’Europe moderne et contemporaine ? Question qu’il pose et résout cependant selon une conceptualité spécifique, qu’il me faudra rappeler, qui assure certes l’originalité de son apport mais en circonscrit aussi les limites(1). De surcroît, précisément parce que cette question est pour lui centrale, il n’a cessé d’y revenir tout au long de son œuvre, multipliant les angles d’attaque, sans d’ailleurs que ces différentes approches soient toujours parfaitement homogènes sinon cohérentes entre elles. La présentation qui suit ne prétend donc pas être exhaustive, loin de là même : elle se limite aux seuls aspects des élaborations de Weber qui ont fait date et débat, en inspirant recherches aussi bien que critiques, en se centrant notamment sur l’ouvrage de Weber qui a le plus fait couler d’encre, L’éthique protestante et l’esprit du capitalisme(2).


On sait que Weber fait de « l’activité sociale » la catégorie principale de sa sociologie ; et de la compréhension de cette activité le principe de toute explication sociologique. En conséquence, il est amené à définir le capitalisme en ces termes : « Un acte économique sera dit ‘capitaliste’ avant tout quand il repose sur l’attente d’un profit obtenu par l’utilisation de chances d’échange, quand il repose, donc, sur des chances de gain formellement pacifiques. » (3)


Le capitalisme ne désigne donc pas chez Weber, du moins immédiatement, un système économique et social : un ensemble de relations ou de rapports formant système, comme c’est le cas chez les libéraux aussi bien que chez Marx. A travers cette notion, Weber désigne bien davantage une forme ou un mode spécifique de comportement économique qui, en se généralisant et en se stabilisant, peut certes donner lieu à la formation d’un système économique, mais dont l’intelligibilité doit toujours se rapporter aux actions et activités des agents individuels qui lui servent de moteur et de principe. On reconnaît ici la défiance de Weber à l’égard de ce qu’il appelle « les concepts collectifs » et sa volonté de rapporter l’explication des structures sociales à la compréhension des comportements individuels : « (...) pour l'interprétation compréhensive de l'activité que pratique la sociologie, ces structures ne sont que des développements et des ensembles d'une activité spécifique de personnes singulières puisque celles-ci constituent seules les agents compréhensibles d'une activité orientée significativement. » (4)
ALAIN BIHR
Les origines du capitalisme selon Max Weber
http://www.revue-interrogations.org/article.php?article=34