30 Ara 2011

Métamorphoses de l'âme et ses symboles

Recherches historiques sur l’inconscient de l’homme moderne.

L’exposé de Freud sur le fantasme sexuel, qu’il fait dériver de la légende d’Œdipe, est proposé comme un exemple de légendes classiques exprimant des concepts psychologiques fondamentaux ; elles pourraient être encore mieux comprises et appréciées en analysant ces concepts.
De même que l’étude de l’activité de l’inconscient de celui-ci peut s’appliquer à la compréhension de la psychologie des problèmes historiques et symboliques, ainsi l’inverse, càd l’étude comparative du matériel historique, pourrait éclairer les problèmes psychologiques individuels d’aujourd’hui. C’est précisément dans la perspective d’acquérir de nouvelles connaissances sur les fondements de la psychologie qu’est proposée l’étude du matériel historique.

Les deux modes de la pensée.  

Le principe de la répétition ontogénétique de la psychologie phylogénétique est expliqué en montrant la relation entre l’inconscient humain, ou pensée non dirigée, et la mythologie et les légendes. Description des deux types de pensées : la pensée dirigée dont la science est la forme supérieure et qui est fondée sur le discours, et une pensée non-verbale, indirecte et associative, appelée communément rêve. Ces deux formes de pensées se rapportent à deux activités humaines : l’adaptation à la réalité extérieure et le retour vers des intérêts subjectifs. La pensée indirecte caractérise les anciennes cultures, l’homme primitif et les enfants. Le parallélisme entre la pensée mythologique des anciens et celle des enfants et des primitifs, ou encore celle que l’on retrouve dans les rêves, laisse supposer qu’il existe une correspondance entre le développement ontogénétique de l’individu et la phylogenèse du développement psychologique du genre humain. L’examen de certains contes et mythes illustre l’idée que ce qui représente chez l’homme moderne un fantasme secret était, jadis, une coutume ou une croyance parfaitement acceptées : l’origine du fantasme individuel est considéré comme une compensation, celle par exemple de l’adolescent qui rêve d’être issu de parents sains et importants, fantasme que l’on retrouve dans les légendes de Remus et Romulus ou de Moïse. La pensée dirigée entre en contact avec les contenus de l’inconscient mais pas avec ses motivations.

 

L’hymne à la création.

L’analyse du conflit inconscient à l’origine du poème onirique de Miss Miller, "L’hymne à la création", et la recherche du but de ce rêve conduisent à une interrogation sur la place de Dieu et de la religion dans l’adaptation psychique de l’homme. "L’hymne à la création" écrit par Miss Miller à son réveil, représente la projection des conflits refoulés nés de son attirance amoureuse pour un marin à peine entr’aperçu, tandis que sa propre interprétation du rêve dénote son identification à la protestation d’innocence de Job et rejette tout le "mal" sur les autres. Le rôle de Dieu, archétype paternel projeté et dépositaire des problèmes humains, est abordé par rapport à une demande religieuse de confession ; cette dernière maintient la conscience des conflits - ce que recherche la psychothérapie.

 

Le chant de la mite.

Analyse détaillée du symbolisme sous-tendant le poème, "Le chant de la mite", de Miss Miller et tentative pour décrire l’état psychologique de l’auteur, en fonction de ce symbolisme mais aussi des explications qu’elle en donne. Il s’agit d’un poème onirique comme "L’hymne à la création" et il révèle les mêmes complexes. Miss Miller interprète elle-même le désir de la mite pour le soleil comme le désir de l’homme pour Dieu, et les recherches sur le symbolisme du soleil confirment ce thème. On considère que le poème traduit l’intention de transformer son désir pour l’homme, son objet d’amour (le chanteur), en un désir pour Dieu. L’énergie psychique (la libido) crée l’image de Dieu en utilisant un modèle archétypique et conséquemment en vénérant comme divine cette même force psychique ; ceci permet à l’homme de sentir en lui la divinité et d’augmenter son sentiment d’importance et de puissance. Un grand nombre de textes et de références confirment le symbolisme du soleil, de la lumière et du feu comme représentants du divin. On considère que ces concepts récurrents représentent un archétype, càd non pas une idée héritée mais une disposition de l’homme à produire des idées similaires. En évoquant les précédents historiques des symboles de la mite et du soleil, c’est pour le héros solaire que brûle l’âme/mite de Miss Miller. Les fantasmes morbides de Miss Miller sont représentatifs de l’ambivalence de l’amoureux vis-à-vis de sa passion dont le pouvoir est en même temps bénéfique et destructeur. 

 

Le pouvoir de la libido

En référence au concept psychologique de libido, développement des références classiques relatives au symbolisme concerné dans le poème onirique "Le chant de la mite" et au symbolisme du phallus dans les légendes. On cite les références au soleil comme image de Dieu, le soleil représentant le pouvoir créateur de l’âme (la libido). On fait remarquer que le culte du soleil est logique si on considère la dépendance physique de l’homme par rapport au soleil. Des extraits du Shvetashvatara Upanishad et du Kasha Upanishad présentent comme divins des symboles phalliques, tels que les poucets ou les nains mais aussi le soleil, aussi puissants que la clé offerte par Méphistophélès à Faust. Tous ces symboles représentent le pouvoir de la libido, le phallus en particulier représentant la divinité créatrice. Ces exemples servent à montrer que la "libido" de Freud n’est pas uniquement sexuelle, bien que la sexualité soit un composant de sa force. Il est fait appel à la définition de la libido par Cicéron : une "cupidité effrénée" opposée à la "volonté", et à celle plus large de St. Augustin, pour appuyer une utilisation plus étendue de ce concept.

 

Le concept de libido

Discussion sur la première définition de la libido par Freud et sur les raisons d’une modification de cette définition. Bien qu’à une époque Freud ait considéré la libido équivalente à un intérêt en général, il est finalement retourné à sa première définition d’une libido comme énergie sexuelle inondant les autres instincts et il a pensé que la paranoïa pouvait s’expliquer par la perte de l’intérêt libidinal. Ce qui disparaît dans la schizophrénie est bien plus qu’un intérêt érotique : ce qui est perdu est toute la relation à la réalité et la libido est identique à ce qu’on appelle l’énergie psychique, l’appétit à son état naturel. La différenciation, dans le psychisme humain des besoins et pulsions élémentaires liés à l’instinct de reproduction, a créé des fonctions psychiques complexes qui sont à présent indépendantes de la sexualité. Cette conception de la libido, plus large et énergétique, explique le fait patent qu’un instinct peut être dépotentialisé en faveur d’un autre ; c’est ainsi que les perturbations sexuelles de la névrose sont des phénomènes secondaires et non primaires. La perte de réalité dans la schizophrénie n’est donc pas causée par une libido incontrôlée, mais provient de l’investissement de l’énergie psychique dans des fantasmes archaïques. On considère que dans les névroses, la réalité est plutôt faussée que perdue et que le fantasme est plutôt d’origine personnelle qu’archaïque. On pense que le bénéfice pour l’homme de cette énergie psychique investie dans des formations analogiques se trouve dans le développement général de l’esprit humain, de la préhistoire à nos jours.

 

La métamorphose de la libido

On analyse, chez une patiente schizophrène, les modèles de réactivation régressive au stade pré-séxuel et on les compare à la transformation de la libido liée à la préparation du feu et au mouvement rythmique des premières étapes du développement humain. Ce cas fait apparaître une régression vers les mouvements rythmiques précoces, tels ceux que l’on observe dans la succion rythmée des bébés, lorsque la libido est encore investie dans la zone nutritionnelle. Avec la transformation de la libido au cours du développement de l’enfant, ce modèle est transféré vers d’autres fonctions et ultimement vers la fonction sexuelle. On appelle cependant "période pré-sexuelle", la période allant de la naissance aux premières manifestions sexuelles patentes. La littérature et les légendes fournissent des exemples de la relation entre la lassante activité rythmique observée dans la régression des patients et la préparation du feu. On cite des exemples provenant des différentes périodes de l’histoire et de peuples variés pour confirmer l’existence d’une ressemblance générale entre la préparation du feu et la sexualité. Etant donné que la sexualité est la composante psychique dotée de la plus forte tonalité affective, les régressions, comme les rituels primitifs, manifestent une analogie avec elle bien qu’ils dérivent en fait d’un stade libidinal pré-sexuel. On considère également comme pré-sexuelle la transformation de la libido. Bien que la peur ne soit incontestablement pas à écarter, le refoulement de la libido est plutôt fondé sur des facteurs externes et internes que sur le tabou de l’inceste proposé par Freud. La force d’un tel refoulement provient d’images primordiales et archétypiques à effet numineux spécifiques. La littérature indoue sur la préparation du feu, les légendes du feu né de la bouche, les références bibliques du feu sortant de la bouche et la poésie de Goethe confondant le son, la lumière, la parole et le feu, sont donnés en exemples de la conversion d’une libido originellement investie dans la sphère nutritionnelle et non dans la sphère sexuelle. Le symbolisme du feu est analysé en référence au Livre de Daniel, au Bhagavad Gita et à Platon, mais aussi à la pyromanie et à la préparation du feu. Les cérémonie du feu sont analysées comme un exemple de la canalisation progressive de l’énergie psychique en action.

 

La naissance du héros

Analyse du héros, appelé "le plus beau symbole de la libido", tel qu’il apparaît dans la mythologie, les légendes et le rêve dramatique d’une patiente, Miss Miller. L’origine de la vision de Miss Miller est une introversion passive qui rejette l’objet d’amour au profit d’un investissement de la libido sur un substitut intérieur créé par l’inconscient. Pour l’humanité en général, cette introversion de l’attention libidinale est patente dans le culte du héros symbolisant une puissance psychique archaïque refoulée par la pression sociale. Ce besoin humain, la recherche d’un surhomme qui symbolise l’idée, les formes et les forces de l’âme est reconnu par l’église catholique qui présente Jésus comme un héros visible. Analyse des prolongements de la signification du sphinx qui apparaît dans le rêve de Miss Miller et l’on en déduit que pour elle, il représente ce qu’il était pour Œdipe : une menace d’inceste. Un Aztèque, image masculine surgissant de l’image du sphinx, confirme cette interprétation ; analyse du sens symbolique des vêtements et de l’apparence de ce personnage. On explique le processus de refoulement et de régression qui mène au surgissement inconscient de ce genre de personnages archétypiques. Dans la mesure où les contenus issus de l’inconscient proviennent du matériel infantile refoulé, on analyse entre autres significations symboliques, la psychologie de l’intérêt de l’enfant pour ses excréments, ce qui touche à l’analité et la confusion qu’il fait entre création et défécation. La création de la personnalité inconsciente est abordée à travers la légende du juif errant, autre figure du rêve de Miss Miller. On cite les légendes et la tradition de l’histoire chrétienne, juive et mithriaque qui renvoient au symbolisme du soleil et où l’on trouve le poisson comme symbole de régénération et de renaissance. Dans ces textes, les héros sont en même temps mortels et immortels. La force psychique vitale, la libido, se symbolise régulièrement par le soleil ou se personnifie dans des figures de héros solaires, autres images de mortalité et d’immortalité. Brève analyse des motivations inconscientes, comme le problème de l’inceste et celui des désirs cherchant à se faire reconnaître.

22 Ara 2011

La société malade de la gestion, Vincent De Gaulejac


LA SOCIETE MALADE DE LA GESTION par hetsgeneve

La société malade de la gestion

Sous une apparence pragmatique, la gestion constitue une idéologie qui légitime la guerre économique et l'obsession du rendement financier. Les " gestionnaires " installent en fait un nouveau pouvoir managérial. Il s'agit moins d'un pouvoir autoritaire et hiérarchique que d'une incitation à l'investissement illimité de soi dans le travail pour tenter de satisfaire ses penchants narcissiques et ses besoins de reconnaissance. Il s'agit d'instiller dans les esprits une représentation du monde et de la personne humaine, en sorte que la seule voie de réalisation de soi consiste à se jeter à corps perdu dans la " lutte des places " et la course à la productivité.
Or, pour comme pour mieux assurer son emprise, cette logique déborde hors du champ de l'entreprise et colonise toute la société. Aujourd'hui, tout se gère, les villes, les administrations, les institutions, mais également la famille, les relations amoureuses, la sexualité... Le Moi de chaque individu est devenu un capital qu'il doit faire fructifier. Mais cette culture de la haute performance et le climat de compétition généralisée mettent le monde sous pression.
Le harcèlement se banalise, entraînant l'épuisement professionnel, le stress et la souffrance au travail. La société n'est plus qu'un marché, un champ de bataille insensé où le remède proposé aux méfaits de la guerre économique consiste toujours à durcir la lutte. Face à ces transformations, la politique, à son tour contaminée par le " réalisme gestionnaire ", semble impuissante à dessiner les contours d'une société harmonieuse, soucieuse du bien commun.
Peut-on néanmoins échapper à l'épidémie ? Peut-on repenser la gestion comme l'instrument d'organisation et de construction d'un monde commun où le lien importe plus que le bien ?

28 Ağu 2011

Les sources de la honte

Si donc la honte est un sentiment éminemment social,
puisqu’elle naît sous le regard d’autrui dans la confrontation du sujet au monde, elle s’enracine dans ce qu’il y a de plus intime, dans le sentiment d’exister comme être unique, différent des autres, ayant une singularité propre. Elle s’inscrit dans la recherche de cohérence entre soi et soi, entre soi et le
monde. Elle est du registre de l’être, à la différence de la culpabilité qui est du registre du faire.  
On peut soulager la culpabilité par la confession, la réparation, la punition ou le repentir, alors que la honte nécessite une transformation de
soi-même.
 
C’est l’être profond qui est atteint, comme s’il y
avait quelque chose d’irréversible. Toute la vie est concernée
: les croyances, les valeurs, mais aussi les relations, la
famille, la culture, le rapport à la société. Tous les aspects de
l’identité sont bouleversés. (p. 142).

« Ce n’est pas la pauvreté qui provoque la honte, c’est une combinaison entre plusieurs sentiments dans le rapport avec autrui : la différence, la condescendance, le sentiment d’injustice, la colère rentrée que l’on ne peut exprimer parce qu’il faut être reconnaissant… Toutes ces violences humiliantes, l’enfant les reçoit comme autant de coups psychiques » (p. 111).

 
...« les violences humiliantes » qui président à l’installation de ce sentiment au coeur de l’appareil psychique et la vulnérabilité qu’elle produit dans la construction de l’identité...

...l’influence de la réalité (sociologie) et celle de la réalité psychique
(psychanalyse) sur le comportement humain...

...des réactions défensives, face à la honte intériorisée, qui sont à la jonction « des mécanismes de défense » et « de réponses stratégiques identitaires ». Il s’agit de l’ambition qu’il décrit comme un contre-poison, le repli sur soi, l’utilisation de l’alcool et l’orgueil sont autant des mécanismes réactifs qui ne permettent pas de s’en dégager...


http://www.erudit.org/revue/smq/1999/v24/n2/013022ar.pdf

9 Tem 2011

Üçüncü Sinema ve Üçüncü Dünya Sineması

Üçüncü Sinema’nın kökleri Üçüncü Dünya ülkelerinin ikinci Dünya Savaşı sonrası gerçekleştirdikleri anti-emperyalist mücadeleye dayanır. Üçüncü Sinemacılar, Hollywood’un pasif izleyiciyi eğlendirmeye dayanan sineması ile Avrupa’nın birey odaklı sinemasını, içinde bulundukları toplumsal mücadelede işlevsiz ve hatta zararlı görmüş, bunun yerine daha militan ve politik bir sinemayı savunmuştur. Bu kitapta beşi çeviri sekizi özgün on üç makale ile önce Üçüncü Sinema'ya kuramsal yaklaşımlar ele alınmakta ve daha sonra Üçüncü Dünya Sineması'ndan örnekler Üçüncü Sinema'yla yakınlıkları ve uzaklıkları da tartışılarak incelenmektedir.

2 Tem 2011

L'invention de la solitude

" Un jour il y a la vie. Voici un homme en parfaite santé, pas vieux, jamais malade. Tout va pour lui comme il en fut toujours, comme il en ira toujours. Il vit au quotidien, s’occupe de ses affaires et ne rêve qu’aux réalités qui se présentent à lui. Et puis, d’un seul coup, la mort. Notre homme laisse échapper un petit soupir, s’affaisse dans son fauteuil, et c’est la mort. Si soudaine qu’il n’y a pas de place pour la réflexion, aucune possibilité pour l’intelligence de se trouver un mot de consolation. Il ne nous reste que la mort, l’irréductible évidence que nous sommes mortels. On peut l’accepter avec résignation au terme d’une longue maladie. On peut même attribuer au destin un décès accidentel. Mais qu’un homme meure sans cause apparente, qu’un homme meure simplement parce qu’il est un homme, nous voilà si près de l’invisible frontière entre la vie et la mort que nous ne savons plus de quel côté nous nous trouvons. La vie devient la mort, et semble en avoir fait partie depuis le début. La mort sans préavis. Autant dire : la vie s’arrête. Et cela peut arriver n’importe quand. ..."

29 Haz 2011

Une trop bruyante solitude

" Voilà trente-cinq ans que j'emballe des livres et du vieux papier et je vis dans un pays qui sait lire et écrire depuis quinze génération; j'habite un ancien royaume où c'est depuis toujours l'usage et la folie de s'entasser patiemment dans la tête images et pensée porteuses de joies inexprimables et de douleurs plus fortes encore, je vis au milieu de gens prêts à donner jusqu'à leur vie pour un paquet d'idées biens ficelées. Et maintenant, tout cela se répète en moi; voilà trente-cinq ans que je bois des litres de bière, pas pour boire - j'ai la terreur des ivrognes -, mais pour aider la pensée, pour mieux pénétrer au cœur même des textes, parce que lorsque je lis, ce n'est pas pour m'amuser ou faire passer le temps ou encore mieux m'endormir; moi qui vis dans un pays où, depuis quinze génération, on sait lire et écrire, je bois pour que lire m'empêche à jamais de dormir, pour que lire me fasse attraper la tremblote, car je pense avec Hegel qu'un homme noble de cœur n'est pas forcément gentilhomme ni un criminel assassin. Si je savais écrire moi, j'écrirais un livre sur les plus grand malheurs et les plus grand bonheurs des hommes. "
 pg11-12 
 «Je ne suis venu au monde que pour écrire Une trop bruyante solitude»
 Bohumil Hrabal

18 Nis 2011

Sexe, Race et Pratique du pouvoir

On imagine trop souvent que les caractères  « naturels » (le sexe, la race, par exemple) « tombent sous le sens », sont des évidences inquestionnables. Tout au plus admet-on que les sociétés manipulent un peu tout cela, qu'il en résulte des différences, bonnes ou mauvaises, c'est selon… Pourtant, ne serait-ce pas déjà une manipulation que de prétendre certains caractères « naturels » ? Le « naturel » ne serait-il pas une interprétation, bref un  « artifice », ancré dans de très particulières relations sociales où certains sont assignés à l'état d'objet ? Cet ouvrage associe la description d'une réalité matérielle quotidienne dans ses formes les plus banales (conversations de bistrot, scènes de rue, faits divers) et l'analyse précise des systèmes idéologiques qui prétendent expliquer cette réalité. 
(quatrième de couvreture)

3 Nis 2011

GUERRE ET SACRIFICE, La violence extrême

Peut-on ranger sous la même étiquette les « dommages collatéraux » causés par des missiles sophistiqués et les attaques-suicides des terroristes, et peut-on faire appel à la notion de sacrifice pour penser ensemble ces formes de violence extrême ?
...
Lorsque, sous les yeux d’une famille musulmane, qui n’a pas encore tué le mouton de l’Aïd, un soldat serbe égorge un adolescent kosovar, en disant que ce dernier constituera une meilleure offrande, puisque Abraham avait reçu l’ordre d’immoler Ismaël (p. 94), il témoigne d’une certaine proximité de la guerre et du sacrifice, mais aussi de leur différence radicale. Car, pour lui comme pour sa victime, il est clair qu’il s’agit d’un crime doublé d’un sacrilège.
Au moins cet exemple, qui rappelle les origines violentes du sacrifice, permet-il de conjecturer une proximité étrange, voire un rapport intime, entre pratiques religieuses et pratiques de guerre.

Mais, y a-t-il quoi que ce soit de commun entre cet acte para-sacrificiel et les sévices effectués par des soldats américains sur les prisonniers irakiens d’Abou Graib ou encore certains traitements humiliants infligés à Saddam Hussein ?
Par ailleurs, est-il objectif de présenter les impérialistes américains comme des ennemis des peuples libres, particulièrement musulmans, sans rappeler qu’ils ont organisé la défense du Kosovo contre les Serbes ?
Ou encore, est-il bien légitime de qualifier d’acte impérialiste l’occupation du Japon en 1945, et de fermer les yeux sur le massacre des Kurdes et l’invasion du Koweit par Saddam, au motif que celui-ci servirait de bouc émissaire aux impérialistes ?

Le livre de Kilani pose malgré tout un vrai problème de fond. Il s’agit de savoir si la guerre et le sacrifice, ainsi d’ailleurs que d’autres types de violence institutionnelle, telle la vendetta, obéissent bien à des logiques fondamentalement différentes, comme le pensent la plupart des anthropologues, et peuvent se perpétuer en conservant leur hétérogénéité. Ou si, au contraire, toutes ces différences ne seraient pas superficielles, et ne tendraient pas à s’effacer dans le monde moderne « globalisé » où de multiples formes de violence, qu’elles soient d’ailleurs codifiées ou sauvages, mais toujours massives et acceptées dans une sorte d’indifférence générale, semblent avoir pour trait commun une « tonalité sacrificielle qui ne se déclare pas »

Un trait caractéristique du sacrifice proprement dit, qu’il soit humain ou animal, est d’autoriser les hommes à faire un grand nombre de victimes dans une sorte d’apathie générale, au nom d’un objectif moral supérieur (p. 101). Alors que, dans la vie ordinaire, la mise à mort, ou seulement les mauvais traitements, infligés aux hommes ou aux animaux soulèvent l’indignation de tous, dans le contexte sacrificiel, ces violences sont acceptées. Il faut bien, croit-on, pour honorer les esprits ou les dieux, ou célébrer les fêtes destinées à perpétuer la société, accomplir de telles violences.

Or, remarque Kilani, il y a des situations apparemment profanes, où l'on observe la même indifférence au sort des victimes. Un exemple simple et probant serait celui des accidents de la route. Jusqu'à ces toutes dernières années, tout le monde ou presque acceptait, notamment en France, que « la route » – comme on disait pour dégager la responsabilité des hommes –  «fît chaque année dix mille victimes », soit beaucoup plus que les dernières guerres dans lesquelles le pays s’était trouvé engagé. Ces morts étaient comme un sacrifice ou un tribut payé au dieu automobile, ou encore un « dommage collatéral » du progrès technique. On les tenait, et on les tient encore, pour inévitables, alors que, en réduisant drastiquement la vitesse des véhicules, on ferait tendre vers zéro le nombre de victimes.

Wiel Eggen , « Mondher Kilani, Guerre et sacrifice. La violence extrême », L’Homme , 187-188 | 2008 , [En ligne], mis en ligne le 16 décembre 2008. URL : http://lhomme.revues.org/index20862.html. Consulté le 03 avril 2011.

6 Mar 2011

L'évidence de l'égalité des sexes: une philosophie oublié du XVIIe siècle

L'égalité des sexe semble acquise aujourd'hui. Malgré le prix qu'il en a coûté aux féministes et à l'ensemble des femmes, l'égalité, si longtemps revendiquée, est enfin admise, reconnue, gagnée. Soit. La réalité, elle, montre que l'égalité de droit entre les hommes et les femmes dont témoigne un arsenal législatif conséquent depuis 1980, rend néanmoins flagrant le hiatus qui démeure entre le droit et le fait. Depuis 1980, avons-nous dit: pourquoi pas 1944 et l'ordonnance signée par De Gaulle, donnant aux femmes le droit de vote, cent cinquante-cinq ans après 1789, quatre-vingt-seize ans après l'instauration du suffrage masculin en 1948 ? Pourquoi pas 1965 et l'autorisation accordée aux femmes de travailler ou d'ouvrir un compte bancaire sans l'autorisation de leur père ou de leur mari ? Ou 1967 pour la loi sur la contraception ou bien le 17 janvier 1975 pour la loi autorisant l'interruption volontaire de grossesse, si fondamentale pour la liberté des femmes à disposer de leur corps et de leur sexualité ? Ou encore 1999 et la révision constitutionnelle en date de 28 juin des articles trois et quatre stipulant que la loi "favorise l'égal accès des hommes et des femmes aux mandats électoraux et aux charges électives" et que les partis politiques "contribuent à la mise en œuvre de ce principe" ? Il nous paraît cependant plus approprié de prendre la loi du 23 décembre 1980, loi qui qualifie le viol de crime et n'exclut plus le viol conjugal car le dispositif juridique en France peut désormais considéré comme abouti, bien que perfectible. ...


Elsa Dorlin, L'évidence de l'égalité des sexes, L'Harmattan, 2000, pg 9

2 Mar 2011

Le Voile Médiatique

...les mécanismes médiatiques qui ont fabriqué et imposé un faux problème, sélectionné les « experts autorisés », et écarté la plupart des voix discordantes...

3 Şub 2011

Les Derniers Jours de l’humanité

"Inspiration krausienne consisterait à dénoncer le règne du faux-semblant généralisé dans lequel sont installées les puissances occidentales. Contrairement aux apparences, ce monde « développé » moderne ne connaît ni la paix, ni la prospérité, ni la liberté pour tous, sinon en trompe-l’œil comme privilèges de minorités dominantes, masquant une réalité fondamentalement faite de violence, d’inégalité et d’oppression. La barbarie moderne n’a pas diminué, mais elle a appris à se farder davantage."


 Karl Kraus, contre l’empire de la bêtise, par Alain Accardo [Le Monde diplomatique - Août 2005]